Abou Traoré – sculpteur

Né le 1er janvier 1960 à Bobo-Dioulasso au Burkina-Faso, alors Haute-Volta, Abou Traoré est issu d’une lignée de forgerons – charge symbolique et sociale située au delà de la dimension technique du travail.
Il hérite de la technique ancestrale de la cire perdue par son père, Assane Traoré et commence sa formation dès l’âge de 10 ans dans l’atelier familial.

Il fond et sculpte en son nom depuis 1983, année où il a imposé une rupture avec le productivisme qui régnait dans l’atelier familial pour se diriger vers la création artistique. Il a également apporté des améliorations à la technique du bronze dans le quartier de Koko de Bobo-Dioulasso (Quartier des bronziers).

Son originalité plastique met en évidence un artiste créateur et le fait remarquer par le Centre Culturel Français de Bobo-Dioulasso qui l’exposera de nombreuses fois.

Sa rencontre en 1984 avec des sculpteurs suisses et français du  Groupe Fuzion  tel que Pierre Jaggi marque un tournant dans son travail. Il intègre le groupe de 1984 à 1991 et expose avec eux en France et en Suisse.

En 1990, il remporte le  1er Prix de la Semaine nationale de la culture  (SNC Bobo-Dioulasso).
En 1991, il est remarqué par  Pierre Gaudibert, alors responsable du musée des arts africains et océaniens de Paris, qui le citera dans son livre «  Art africain contemporain  ».
Dès 1994, il participe à de nombreuses rencontres artistiques en  France  ainsi qu’au  Togo  à Lomé (Asso. Ewolé).
Il participe également à la deuxième édition de  Ouag’art  au sein du Centre culturel français alors dirigé par Guy Maurette.
En mars 2001, il participe à un symposium avec des artistes du CCA Terre blanc (France) à Bobo-Dioulasso. Cette rencontre réoriente son travail vers une plus grande abstraction.
En 2003, il participe à la  Biennale off de Dakar  au sein de la Galerie Terangart.

En 2012, il est repéré par l’Agence Deneulin  qui promeut son travail en France et en Europe.
Récemment son travail a été montré chez  PIASA-Paris  (Exposition Le Cube),  Galerie Art-Z |Olivier Sultan-Paris, au  Comoedia  à Brest  et à l’INSA de Lyon  dans une exposition commune avec Leslie Amine.

Il vend régulièrement ses oeuvres à des collectionneurs africains et européens.
L’Etat burkinabè lui a fait plusieurs commandes publiques.

voir son site : www.abou-traore.org

Laissons parler Abou Traoré
(retranscription de l’interview vidéo réalisée par Boubacar Coulibaly (2018) et de l’interview par Oba Shola Akinlabi pour Obart (2020)

« Je suis forgeron de part les liens du sang. Je n’ai pas besoin de fanfaronner en criant sur tous les toits les secrets du forgeron. Non. Je suis sur la voie tracée par les ancêtres. Et je ne suis qu’au début du chemin. Je respecte les traditions et les applique comme elles m’ont été enseignées. Pas besoin de s’exhiber, mais ce qui aurait dû être fait l’a été en amont.

Je suis né forgeron, ça je ne peux pas me l’enlever. Ma démarche artistique peut-être autre que ce rôle de forgeron dans la société africaine et ma démarche est autre aujourd’hui. Mais cela ne m’empêche pas de jouer pleinement mon rôle de forgeron.

Il m’est difficile de me définir moi-même en tant qu’artiste. Mais je me suis engagé pour exprimer esthétiquement les valeurs qui me sont propres et contribuer à une culture universelle.

Mon empreinte est liée à la mythologie du masque africain et des origines de la création, dans l’univers traditionnel africain. Mon empreinte est donc liée à mon éducation, à mon vécu, à ma société et à une continuité de la transmission.

J’ai toujours travaillé avec cette technique de bronze, la façon dont j’ai appris. C’est vrai que j’ai amélioré, j’ai ajouté d’autres techniques, j’ai d’autres manières de faire que j’ai appris.
Il y a le plaisir de faire ce métier qui fait que j’ai cette aisance avec la main.

Parce que c’est comme ce que tu aimes faire, quand tu le fais avec amour. Quand je le fais, je le fais avec mon cœur. Toute chose qu’on réalise, il faut d’abord aimer la chose, avoir de la passion pour la chose, avant de se lancer. L’art se fait avec beaucoup d’abnégation.

L’inspiration vient en travaillant. Je vais chercher l’inspiration en fait, et c’est vrai qu’elle tourne autour de l’environnement, des animaux, des représentations animales, soit disant animales, mais pas figuratif, mais pas abstrait, pas complètement abstrait. C’est cette démarche pour arriver à passer de l’autre coté de l’abstraction qui m’intéresse beaucoup.

Je ne suis pas un bon dessinateur, je commence par faire de petites esquisses. Je commence par prendre la cire, dès que … en cherchant l’idée, que je trouve la forme, que je prends un bout de cire, je commence à faire un petit objet que je pose et je réfléchie comment faire le cheminement jusqu’à me dire «  Tiens maintenant, je peux la réaliser en cette dimension là.  »

Au-delà de la dimension esthétique, je définirais l’art comme une vibration de mon être intérieur qui se traduit dans ce que je veux créer et montrer.

Je pense que l’art contemporain est une réalité de notre temps qui s’ouvre de plus en plus aux diverses horizons de notre monde actuel.

Il faut dire que les émotions sont liées souvent à notre état d’esprit, ce qui peut nous influencer dans l’inspiration et dans l’acte de création. Je peux dire que les sentiments et la valorisation de l’homme et de la société prédomine dans mon travail. »